Que diras-tu ce soir, pauvre âme solitaire

La plupart de nos suspicions sont éveillées par ce que nous connaissons de nous-mêmes. --  feat @Johannes von Reiner et @Alcina Kowalski

Quelques dizaines de minutes avant minuit

Tout avait commencé par cette divinité se prétendant être la seule et unique Athéna, utilisant de son pouvoirs afin de s’assurer que les velléités de violence seraient punies. Malgré cette menace invisible, malgré la certitude que la déesse de la sagesse -comme n’importe quel autre divin de son panthéon- n’avait rien à voir dans cette soirée placée sous le signe de la « paix », Circé avait tenté d’utiliser son pouvoir sur un des gardes du corps du Faunysos. Elle en avait payé le prix. Malgré ses doutes, elle avait bu dans la coupe qui lui avait été tendue et le poison avait rapidement fait son œuvre. Puis à peine avait-elle eu le temps d’expulser une partie du poison de son corps qu’une attaque survenait, menée par des tueurs de dieux. L’invitation a cette soirée avait été un traquenard dès son annonce et pourtant, si mille et un scénarios avaient pu être imaginés pour anticiper ce qu’il adviendrait, le fait que des déicides viennent jouer les troubles fêtes -menés par celle qui avait commis un parricide- ne faisait pas partis de ceux auxquels Circé aurait pu songer. Et usant à nouveau de son pouvoir afin d’user de son assaillante à son avantage, elle n’avait dû sa fuite qu’à la présence à ses côtés du dieu nordique Loki.

A peine avait-elle à nouveau utilisé son pouvoir, le saignement de son nez avait reprit de concert avec une migraine commençait à assaillir à son crâne. Quelle maudite divinité pouvait avoir un tel pouvoir ? A peine eut-elle prit le contrôle de l’esprit de son assaillante que cette dernière fut mise hors d’état d’utilisation par un Loki se chargeant de son genou. Sur le moment Circé n’avait pu réagir : la migraine s’était emparée d’elle et un vertige l’assaillait désormais tant elle avait pu être affaiblie, elle se devait de se concentrer sur elle-même ne serait-ce que quelques secondes. Si elle s’effondrait sur place, elle n’était pas certaine d’être libre à son réveil. Elle s’était senti vaciller et avant que l’angle de chute ne l’entraîne vers le sol, elle s’était retrouvée portée et à peine quelques battements de cœur plus tard le jardin des Tuileries avait disparu.

Le décor était désormais devenu un appartement donnant sur le port de Grenelle et le pont Bir-Hakeim. Un lieu probablement familier au nordique pour qu’il décide de s’y réfugier mais qui ne l’était pas le moins du monde pour la sorcière qui ne lui vouait pas une confiance aveugle au point de s’écrouler d’épuisement devant lui. Ses pieds touchant à nouveau le sol, il lui fallut plusieurs secondes pour stabiliser son équilibre avant de s’avancer prudemment jusqu’à une des chaises existantes dans l’appartement et de s’y asseoir le temps de rassembler quelque peu ses esprits. Elle se massa les tempes. Tout s’était enchaîné en l’espace de quelques minutes et les retombées ne tarderaient pas à se faire connaître. L’humaine aurait pu être utile pour obtenir des informations mais il semblait que Loki ait fait le choix de prendre dans sa fuite ce qui lui était passé par la tête. Soupirant légèrement, elle essuya d’un revers de la main le sang encore frais qui avalait coulé sur ses lèvres. Elle pouvait s’estimer heureuse d’être ici et fatiguée et non piégée aux Tuileries entre divins et déicides. Deux extrêmes et un oupyr qui… Johannes était-il encore là-bas ?!

Elle écarquilla les yeux un instant avant qu’elle n’ouvre son sac pour en sortir son téléphone et qu’elle ne compose le numéro de celui qu’elle avait aperçu au cours de la soirée. Du moins ce fut ce qu’elle cru faire avant qu’un voile noir ne se baisse devant ses yeux, lui faisant perdre le fil du temps et la voyant reprendre conscience que bien des minutes après son arrivée.

L’urgence. Ce fut ce sentiment qui la tira soudainement des brumes de l’inconscience, se trouvant sur un canapé : elle devait appeler Johannes mais l’avait-elle fait avant de s’évanouir ? Elle sélectionna le numéro qu’elle voulait puis ne prêtant pas attention à l’éventuelle présence de Loki, elle porta le téléphone à son oreille. La sonnerie retenti. Deux fois. Quatre fois. Le doute s’empara d’elle et alors qu’elle imaginait déjà l’oupyr capturé ou tout simplement définitivement tué, il décrocha.

- J’ai besoin de toi, Joha… Une fois féminine s’adressa à elle. Que lui était-il arrivé ? Elle se massa la tempe. Venez me chercher au Elle ouvrit la carte sur son portable pour regarder sa position. 4 boulevard de Grenelle. Faites au plus vite, parvint-elle à dire avant de simplement raccrocher, restant quelques minutes allongée avant de se décider à se lever et de sortir d’ici.

Elle attendit de longues minutes à l’extérieur, de très longues et trop nombreuses minutes, avant qu’une berline noire ne finisse par s’arrêter devant elle. Quelques secondes furent nécessaires à Circé pour comprendre que la voiture était pour elle et lorsqu’elle ouvrit la portière elle découvrit non seulement une plantureuse blonde au volant mais surtout un Johannes en un bien piteux état.

- Malaká, que t’es-t-il… commença-t-elle à s’exclamer avant qu’à travers les brumes de la migraine elle ne comprenne pourquoi il était aussi affecté : sa nature était vouée à être dangereuse, même s’il n’attaquait pas. Est-ce que tu as pris ce qu’il fallait dans le coffre ? lui demanda-t-elle avant de s’adresser à la femme. L’hôtel Peninsula, j’y ai une suite où nous pourrons nous réfugier sans crainte. Elle attendit que la voiture démarre avant de porter son attention sur l’oupyr malgré la fatigue qui menaçait à nouveau de l’emporter si elle ne se soignait pas au plus vite.

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La fatigue causée par son corps combattant le poison se faisait encore ressentir. La migraine induite par les répercussions de l'utilisation de son pouvoir sous embargo divin restait présente, faisant pulser ses veines contre ses tempes. Perdre connaissance semblait avoir permis d'atténuer quelque peu ces maux, ils n’en restaient pas moins présents et de fait il était plus que nécessaire qu'elle utilise une de ses potions pour se soigner. Un éclair de lucidité l'avait alors frappée à son réveil, lui rappelant la présence de Johannes à la soirée, lui rappelant que ce qu'elle avait subit pour avoir utilisé son pouvoir ne pouvait que l'avoir touché lui aussi. Entendre la voix d'une femme lui répondre avait été une surprise sur laquelle Circé avait décidé de ne pas s'attarder, se contentant de donner une adresser où venir la chercher avant de raccrocher sans prendre la peine d'ajouter quoi que ce soit. A quoi bon perdre du temps en palabres alors qu'il y avait une urgence immédiate à laquelle il lui fallait mettre fin le plus rapidement possible. Elle avait attendu de longues minutes dehors et lorsque son esprit eut enfin compris que la voiture qui s'était arrêtée devant elle, lui était destinée, elle n'avait alors pas perdu de temps pour y entrer.

La femme au volant lui était totalement inconnue et semblait être celle dont elle avait entendu la voix au téléphone quelques minutes plus tôt. Johannes quant à lui... Elle ne l'avait jamais vu dans un tel état, pas même à Munich lorsqu'elle l'avait trouvé dans ce sous-sol parmi les prisonniers. Il avait été poussé dans ses retranchements, massacrant ce qui se trouvait sur leur chemin mais il était resté lui-même, cela n'avait pas été au point de réclamer à être tué. L'urgence n'était plus immédiate, elle venait de devenir absolue : il fallait qu'elle soit amenée à son hôtel, il fallait qu'il monte avec elle jusqu'à sa suite et il fallait que lui comme elle consomme une de ses potions. A peine l'adresse de l'hôtel donnée, la voiture démarra. Laissant un soupir s'échapper de sa bouche alors qu'elle s'était laissée s'appuyer contre la portière, le soulagement ne fut que de courte durée, Johannes réclamant du sang. Une fois. Deux fois. Johannes clamant mourir. Impossible de le faire entrer dans le bâtiment par la grande porte. Sortant son téléphone de son sac pour la deuxième fois -non, la troisième-, Circé composa le numéro de la réception.

- Anastasia Rízos, suite rooftop 2. Je vais arriver avec deux amis, il faut qu’il y ait le moins de monde possible lorsque nous arriverons. Seul le voiturier nous accueillera, nul ne devra s’approcher de nous ce soir.

Une requête comme il pouvait y en avoir dans ce monde où l’argent permettait d’accéder aux moindres exigences, où les stars de l’industrie musicale, cinématographique ou d’Internet avaient l’habitude d’émettre mille et unes demandes toutes plus folles les unes que les autres. Celle de ce soir ne ferait pas tâche parmi les autres et il fallait éviter tout risque pouvant déclencher cette bombe qu’était Johannes dans un tel état. Une fois qu’elle fut assurée que sa demande serait prise en compte et appliquée, Circé raccrocha et se concentra sur l’oupyr qui convulsait. A un feu rouge, la femme ce mordit le poignet et le tendit à Johannes. L’esprit essayant de comprendre ce qui se déroulait sous ses yeux, Circé fronça légèrement les sourcils avant de se pencher vers l’allemand.

- Johannes, mein nachtkrieger. Ce n’est pas ce soir que tu mourras, lui dit-elle avant que la voiture ne redémarre pour mieux effacer les dernières minutes les séparant de leur destination, filant à vive allure dans des rues vidées de leur circulation habituelle, les Parisiens s’apprêtant à passer le passage à la nouvelle année d’une minute à l’autre.

Se concentrant pour tenter de repousser la migraine, la grecque ne pu empêcher son regard de passer de Johannes à la blonde. Cette dernière était-elle bien un oupyr ? Se connaissaient-ils tous ou ces deux-là formaient une exception ? La voiture finit par s’arrêter brusquement et lorsque Circé regarda par la vitre à côte d’elle, elle constata rapidement qu’ils étaient arrivés sur place et ne se fit pas prier pour sortir à l’air libre. Tendant un billet vert au voiturier pour s’assurer de sa discrétion, elle attendit que la blonde et Johannes soient sortis pour les guider vers la réception de l’hôtel presque vidée de toute âme et les amener aux ascenseur.

- Dès que nous serons entrés, déposez-le sur le divan. Je vous donnerai quelque chose qui le soignera, expliqua-t-elle avant qu’ils ne montent dans l’ascenseur. Une fois qu’ils seraient dans la suite, elle irait récupérer un des flacons dans le coffres et en donnerait la moitié du contenu à Johannes, prenant le reste pour elle. Il fallait qu’il reprenne des forces en étant pleinement purifié du poison et s’il avait besoin de sang, il fallait qu’elle le soit aussi.

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Dans la voiture la tension était palpable, l’urgence face au danger que représentait Johannes sous le contrôle de la Soif de sang rendait l’air presque inespérable. Il n’était qu’une question de temps avant que l’oupyr ne bascule totalement dans une frénésie difficilement contrôlable et le sang qui venait d’être versé pour l’apaiser quelque peu venait probablement de sceller ce qu’il adviendrait par la suite. La vie humaine en dehors de ses affaires n’était pas une chose pour laquelle Circé vouait le plus grand des intérêts, si elle y portait attention cela concernait l’argent ou sa volonté qu’ils la servent, mais avec un oupyr qui -d’un instant à l’autre- pouvait devenir incontrôlable elle préférait prendre des précaution en ordonnant qu’il n’y ait personne sur leur chemin en dehors du voiturier. Il n’était pas question que des humains soient tués et qu’elle doive en payer les conséquences financières ou juridiques. Elle visualisait déjà leur chemin, elle expliqua la blonde où elle devrait déposer Johannes en entrant dans la suite puis elle sorti de la voiture pour donner un billet au voiturier. Il disparu de son champ de vision et alors qu’elle s’apprêtait à se retourner pour voir ce qu’il advenait des deux autres, une ombre plongea sur elle.

La clavicule n’était pas l’endroit le plus tendre pour recevoir une morsure d’oupyr et ces derniers -dans un tel état- ne devaient pas se préoccuper de la douleur que pouvait ressentir leur donneur -consentant ou non- alors que les dents perforaient avec violence non seulement la peau mais aussi les muscles. La pression exercée par Johannes arrachait sans mal un rictus de douleur à la grecque qui, emprisonnée dans l’étreinte de l’oupyr, luttait contre l’envie de s’écarter : soit elle risquait de faire accentuer l’étreinte et il y aurait de la casse, soit elle parvenait à se libérer au détriment de son muscle. Elle senti sa robe commencer à être déchirée par les mains de Johannes -très probablement guidé par l’instinct d’obtenir plus de surface pour se nourrir-.

- Kataraménoi na eínai oi theoí.
Maudits soient les dieux.

Eut-elle de temps de grogner entre ses dents alors que les crocs venaient désormais percer son cou. Si jamais elle apprenait le nom de ceux qui avaient organisé cette soirée, elle se ferait un plaisir de le leur faire payer. Oh que oui, ils paieraient, très lentement et par tout moyen possible et imaginable. Prenant une profonde inspiration, Circé fit râcler le talon de ses chaussures le long du tibias de Johannes en espérant que cela soit suffisant pour détourner momentanément son attention et lorsqu’elle senti l’étreinte se relâcher presque imperceptiblement, elle se vint se soustraire à la Soif de l’oupyr. A temps car à peine se fut-elle écartée, un bruit de taser se fit entendre. La main à la base du cou pour couvrir la morsure, lorsqu’elle se retourna elle vit la blonde taser en main et Johannes suffisamment raidit par le choc pour être guidé par sa mystérieuse amie. Ils entrèrent dans le hall de l’hôtel, le traversèrent et prirent l’ascenseur afin de rejoindre la suite qu’occupait Circé. Fatiguée et quelque peu affectée par la perte de sang impromptue, la sorcière laissa la blonde déposer Johannes sur le canapé et se laissa tomber sur le fauteuil adjacent. Dieux que cela pouvait douloureux une morsure d’oupyr.

- Prenez une des fioles bleues et pour lui… vous le saurez quand vous serez devant, répondit-elle dans un soupir douloureux, gardant sa main appuyé sur la morsure de laquelle elle sentait le plus de sang s’écouler et observant l’allemand du coin de l’œil. Quelques secondes défilèrent, un bruit de casse venant briser momentanément le silence avant que des bruits de pas s’approchant ne lui succèdent. La fiole dans les mains, Circé s’empressa d’ôter le bouchon puis faisant appel à ses capacités, elle prononça alors les mots suivants aussi bien pour activer sa potion que celle destinée à Johannes : Fytá kai bachariká, giatrépste to martýrio mas Herbes et épices, soignez notre supplice. Et presqu’en même temps ils ingérèrent ce qu’elle avait préalablement préparé pour ce genre d’urgence. Ne buvant que la moitié du contenu, Circé replaça le bouchon et posa la fiole sur la petite table devant elle : mieux valait en garder pour plus tard, au cas où. La respiration courte, elle resta là plusieurs secondes à attendre que les effets de la potions viennent refermer les plaies, nettoyer son organisme et lui rendre sa vigueur.

- Soit ils ne savaient pas qu'un oupyr pouvait venir à la soirée. Soit ils s'en doutaient et ils espéraient que cela tourne mal. Dans les deux cas ce n'était que folie que d'utiliser un tel pouvoir de restriction...

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Cette soirée l’avait épuisée, pas même la potion qu’elle venait de consommer n'était à même d’aider son esprit à reprendre du poil de la bête. Son corps avait de nouveau retrouvé de sa vigueur, le poison ne circulait plus en elle et surtout elle était à même de supporter physiquement le besoin de sang qu’exprimerait assurément Johannes. Malgré les années qui s’étaient écoulés depuis qu’ensemble ils étaient sortis de cet enfer munichois, elle n’avait pas un seul instant oublié la quantité importante de sang qui était nécessaire à l’oupyr afin de contenter sa Soif Rouge. Probablement ce qui pouvait s’apparenter à de la mémoire musculaire. Même si ce soir ne faisait pas exception à ce qu’elle avait connu, Circé sentait que le pouvoir qui avait été utilisé sur tous les invités avait causé de gros dégâts à Johannes mais la potion à base de son sang qu’il avait bue, aiderait à apaiser plus rapidement la Soif, quitte à lui permettre de boire à nouveau mais en quantité plus réduire. Laissant sa tête retomber légèrement en arrière la sorcière attendit patiemment que le prussien revienne à lui et ce ne fut que lorsqu’elle entendit sa voix qu’elle se redressa pour l’observer à nouveau.

Cette femme qui lui était venue en aide, qui était venue la chercher et les amener ici, il apparaissait qu’ils étaient proches l’un de l’autre. Bien des années s’étaient écoulées, peut-être avait-il trouvé une compagne de la nuit à sa mesure ? Peut-être s’agissait-il de sa descendante ? Silencieuse, Circé les observa se tenir l’un près de l’autre, front contre front, avant que Johannes ne se rue vers elle. Pleinement conscient cette fois. Prenant une profonde inspiration elle ne bougea pas lorsque les mains du blond vinrent enserrer ses hanches, fermant ses paupières lorsque l’une d’entre elles commença à remonter le long de son dos. Elle pouvait sentir l’odeur du sang alors que leur visage étaient si proches l’un de l’autre.  Elle glissa une main dans le dos de ce précieux ami et porta la seconde sur l’arrière de sa nuque, à la base de son crâne, avant qu’il n’approche une nouvelle fois son visage de son cou. Elle senti un frisson lui parcourir l’échine et elle l’écouta attentivement -oubliant un instant la présence de l’inconnue proche de Johannes- lorsqu’il s’adressa à elle. En allemand. Laissant ses doigts caresser sa nuque, elle lui répondit non sans regarder un instant cette « enfant » stryge avant de porter à nouveau son attention sur l’oupyr qui était contre elle.

- Ich verfluche diese feindlichen Götter, nicht dich, Sie tun dir sehr weh und werden dafür bezahlen. Ich weiß nur zu gut, dass du immer noch Blut brauchst, aber ich selbst war heute Nacht geschwächt..
Je maudis ces dieux ennemis, pas toi, ils t’ont fait beaucoup de mal et paieront pour ça. Je ne sais que trop bien que tu aies encore besoin de sang mais moi-même j’ai été affaiblie ce soir…

Elle laissa s’échapper un soupir lorsqu’à nouveau le visage de Johannes se trouva face au sien, leur nez se touchant, leurs lèvres s’effleurant. Une main venant lui caresser la joue. Oui, elle avait bien fait de ne boire qu’une partie de son flacon car elle en aurait définitivement besoin cette nuit. Elle serra les mâchoires entendant cette supplication faisant serrer ce cœur battant qui ne se souciait que de certains êtres. Elle pressa doucement ses lèvres contre celles de Johannes avant de les poser sur son front.

- Je te donnerais ce dont tu as besoin, mein herz, finit-elle par répondre à celui qui l’avait autrefois tirée d’un bien mauvais pas dans lequel elle s’était malencontreusement mise. Lui caressant tendrement la joue d’une main tandis que de l’autre elle décrochait le tour de cou de sa robe, elle ramena doucement le visage de Johannes vers sa gorge. Pas ce soir, jeune strygoï. Aucun autre humain ne doit être chassé ce soir, pas après ce qu'il s'est passé aux Tuileries et ce que Johannes à laissé derrière lui avant que vous ne le trouviez. Buvez, ajouta-t-elle à l’attention de la blonde, tendant son bras vers elle. Trinken, Bois. murmura-t-elle à l'attention de Johannes.

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Ce soir la discrétion était plus qu’une nécessité. La menace qui planait depuis des années et qui avait prit un nouveau tournant depuis plusieurs mois n’était pas prête de s’estomper aussi aisément qu’elle n’était apparue, il y a de ça plusieurs décennies. Les deux faux-dieux grecs avaient placé une épée de Damoclès au-dessus de la tête de tous les invités sous couvert d’assurer la paix. Les boissons avaient été empoisonnées et la nourriture avait été viciée. Et peu après que ce maudit celte se fut exprimé dans toute l’assistance, les tueurs des dieux étaient arrivés menée par la bâtarde de Zeus. S’il pouvait n’exister aucun lien entre ces différents points, la possibilité que tout puisse être connecté n’en demeurait pas moins importante. Divinités inconnues alliées aux déicides et à ces guerriers houblonnés… voilà bien un cocktail détonnant qu’il faudrait neutraliser au plus vite ou du moins s’assurer de ne pas se trouver sur le chemin d’une telle association. Elle regarda tour à tour les deux oupyrs. Elle n’était pas dans la plus grande de formes pour se montrer généreuse mais ils n’étaient pas question que son nachtkrieger prenne le moindre risque dehors, bien qu’elle ne puisse éprouver de peine à la pensée de quelques humains vidés de leur sang.

Et puis il y avait cette manière avec laquelle Johannes s’adressait à elle, requérant son sang pour le soigner. Elle pouvait le lui refuser mais elle savait que pour elle comme pour le reste de l’hôtel il valait mieux ne pas contrarier un oupyr mal en point. Mais accepter était garantir la discrétion et le contrôle, il le lui demandait avec une émotion qu’elle n’avait probablement jamais vue chez lui et le voyant ainsi elle ne pouvait se résoudre à le rejeter sans la moindre pitié. Elle le laissa s’expliquer auprès la jeune oupyr, lui signifiant qu’elle ne pouvait pas prendre le risque de sortir se nourrir, puis la regardant à nouveau Johannes expliqua ce qu’elle était. Tendant son bras droit en direction de la blonde, Circé laissa Johannes s’occuper du second, le humant l’on pouvait sentir le parfum d’un vin au cours d’une dégustation. Fermant les paupières elle senti les canines de Johannes griffer sa peau avant qu’il ne vienne les y planter, faisant ainsi couler le sang pour ensuite l’aspirer doucement dans sa bouche pour se nourrir de ce précieux nectar qu’elle avait cette fois accepté de lui offrir.

Hochant avec assurance la tête pour signifier son accord que la femme lui demanda si elle être sûre d’elle, elle se pinça légèrement ses lèvres lorsqu’elle senti un second pincement. Circé prit ensuite une profonde inspiration et laissa les sensation du moment venir effacer momentanément les inquiétudes nées plus tôt dans la soirée. Son sang n’était pas humain mais celui d’une créature plurimillénaire, de fait possédait-il les même intérêts que le sang humain ? Quel goût pouvait-il bien avoir pour que son oupyr préféré choisisse d’y revenir, en particulier lorsqu’il en avait besoin comme en cet instant ? Etait-ce l’immortalité qui faisait la différence dans l’esprit du chasseur qui considérait pouvoir aller plus loin sans risquer de tuer ? La pression à son poignet prit la jeune oupyr s’allégea puis disparu et entendant ces mots d’une langue qu’elle ne pratiquait pas, la sorcière rouvrit les yeux et les posèrent sur la blonde. Au regard de sa mine qui s’était améliorée, il devait probablement s’agir d’un remerciement.

- Reste raisonnable Johannes, si tu en as encore besoin tu pourras en reprendre plus tard, dit-elle en le regardant un instant, passant sa main désormais libre dans ses cheveux, avant d’observer à nouveau la jeune oupyr. Ce que votre père de la nuit n’a pas mentionné est que je suis la sorcière du récit d’Homère, Circé. Je n’ai jamais vraiment su si mon sang possédait des propriétés similaires à celui des humains. Comment est-il ?

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Bien qu’elle ne soit pas étrangère aux morsures d’un oupyr, Circé ne restait pas épargnée par les effets qu’elles pouvaient provoquer. Les battements de son cœur s’accélérant afin de pomper ce sang qui était prélevé en deux endroits différents. Cet élancement dans son crâne qui ne restait relativement silencieux grâce aux gouttes de potion qu’elle avait prises. Ce sentiment provoqué par la sensation du sang aspiré de ses veines, se trouvant être aussi inconfortable que lorsque la morsure était poussée par la sauvagerie de la Soif Rouge mais se révélant être plus plaisante grâce aux caresses que lui adressait Johannes. Le laissant se nourrir avec un calme qui contrastait avec la manière dont il s’était nourri d’elle quelques minutes auparavant, la sorcière focalisa son attention vers cette jeune oupyr dont elle ne connaissait à présent que le diminutif : Al. Se présentant à cette dernière qui ne semblait pas avoir eu besoin de se nourrir autant que son père de la nuit, Circé si elle était parfaitement comprise et son nom lui évoquerait quoi que ce soit. Un léger rire s’échappa et la grecque posa son regard sur le visage de la blonde.

- Ne vous excusez pas pour ça, il en faut plus pour me vexer.

Petite fleur encore innocente dans cette nouvelle condition qui était la sienne. Petite fleur innocente encore ignorante dans ce monde où nombre de légendes avaient leur part de vérité, où les dieux se battaient entre eux et où des créatures se repaissaient des humains. Johannes se retira puis se relevant, il se dirigea vers la cuisine de la suite, les laissant seules quelques instants. Peut-être qu’en étant un jeune oupyr, elle pourrait lui dire quel goût son sang possédait : était-il sucré, léger sur la langue ? Ou bien sa condition de créature le rendait plus fort sur la langue, plus épais ? Avec l’existence des oupyrs, l’œnologie trouvait un autre axe à explorer. Son sang était donc bon, semblant meilleur que celui des humains. Une moue déformant momentanément sa bouche, Circé se pencha en avant pour reprendre le flacon et en boire ce qu’il restait de sa potion mais alors que la dénommée Al s’apprêtait à lui poser une question, elle fut interrompue par le retour de Johannes dont le visage et les mains étaient désormais vierges de toute trace de sang s’étant trouvé là quelques instants plus tôt.

Partir. Possibilité d’être appelé par la fille de Loki, ou peut-être même bien le dieu en personne. La sorcière haussa un sourcil avant de se lever tandis qu’il s’adressait à sa progéniture, lui expliquant notamment que prendre de son sang avait un coût. Etirant ses muscles douloureux après s’être autant tendu lorsqu’il lui avait sauté dessus, elle reporta son regard vers Johannes lorsqu’il se tourna vers elle. Ce qu’il lui devait… Prenant une profonde inspiration tandis que les effets de la potion venaient peu à peu la renforcer, elle s’approcha de lui.

- Je ne peux t’imposer de rester ici pour cette nuit et la journée à venir si tu dois obéir aux demandes que te ferait Loki, commença-t-elle avant de s’arrêter près de lui, venant réajuster le col qu’il portait. Mais avec ce qu’il s’est passé ce soir aux Tuileries, la frustration et la crainte me poussent à te demander toi et non un parfait inconnu qui ne saura pas entièrement me satisfaire. Venant derrière lui elle passa ses bras autours de sa taille tout en venant poser son menton sur son épaule. Et puis tu ne m’a pas proprement présenté ta jeune oupyr. Elle peut se joindre à nous si elle le désire. A ces mots son regard se déporta du profil de Johannes pour accrocher le regard de la blonde.

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Malgré la potion qui coulait dans ses veines, réchauffant chaque parcelle de son corps et venant revigorer ses muscles, Circé sentait la fatigue lutter contre les effets bienfaiteurs de sa mixture. A quoi devait-elle ressembler ? Elle devait probablement faire autant peur à voir que Johannes : livide, les habit en piteux état, du sang maculant sa peau. Quand était-ce la dernière fois qu’elle avait pu expérimenter pareille situation ? Le regard posé sur cet être de la nuit qu’était le germain, il ne fallut guère plus de quelques battements de cœur à l’esprit de la magicienne pour lui rappeler la situation dans laquelle ils s’étaient tous deux trouvés plusieurs décennies auparavant, chacun enfermés dans une pièce et subissant divers supplices. Etait-ce une pure coïncidence ou étaient-ils destinés à emprunter un chemin de douleur, couvert de sang, à chaque fois qu’ils se trouvaient l’un près de l’autre ? Vaste question à laquelle aucune réponse ne serait trouvée ce soir car en cet instant, luttant contre la fatigue : Circé ne désirait pas se retrouver seule. Elle pouvait bien évidemment se trouver une bonne compagnie humaine mais cela constituait un risque de se retrouver face à un déicide, chose qu’elle ne voulait pas, en particulier ce soir.

Le menton posé sur l’épaule de Johannes, la grecque observait la jeune oupyr qui semblait quelque peu perdue face à ce qui se jouait devant elle. Qu’imaginait-elle à leur sujet ? Un demi-sourire vint étirer ses lèvres avant que les mains de Johannes ne viennent se poser sur les siennes, venant les serrer dans un mouvement l’amenant à se presser un peu plus contre lui. Nulle nécessité de voir le moindre humain ce soir quand se trouvaient près d’elle un spécimen si particulier et sa progéniture qui semblait tout juste avoir réalisé ce que la magicienne proposait. Ils étaient fatigués, en effet, mais il était toujours possible de puiser dans des ressources insoupçonnées pour accomplir bien des actes. L’étreinte se relâcha à mesure de l’oupyr s’avançait vers sa congénère jusqu’à finir par se briser lorsqu’il se mit à nouveau parler dans l’une de ces nombreuses langues des pays de l’Est. En un peu plus de trois mille ans d’existence bien des langues avaient été apprises mais toutes n’avaient pu encore être maîtrisées alors, il était peut-être plus que temps pour Circé de renouveler son panel linguistique si elle voulait mieux communiquer avec cette oupyr.

Silencieuse, elle les laissa échanger sur cette proposition qui leur était faite, passant une main sur son visage avant de replacer une mèche de cheveux derrière son oreille. Quelques secondes s’écoulèrent et lorsqu’un sourire vint étirer les lèvres de la blonde avant qu’elle ne hoche la tête, Circé su que cette maudite soirée prenait un tournant plus agréable qui viendrait momentanément chasser les images et les sensations, liées à la menace mise en œuvre par les décides. Elle tendit doucement les bras vers eux.

- έλα σε μένα.
Venez à moi.

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La plupart de nos suspicions sont éveillées par ce que nous connaissons de nous-mêmes. --  feat @Johannes von Reiner et @Alcina Kowalski

Badiner avec des humains était un passe-temps duquel il était rare de se lasser tant ils pouvaient relever d’ingéniosité pour divertir l’être plurimillénaire qu’était la sorcière. Idiots. Intelligents. Transpirants le désir de transgresser consciemment et volontairement la loi divine à laquelle étaient enchaînées leurs croyances. Tous avaient été soumis à la volonté de Circé sans pouvoir y résister et rares avaient été ceux à affronter son influence pour s’enfuir ou du moins le faire suffisamment longtemps pour ne pas être tués. Des siècles durant elle s’était jouée et servie d’eux sans le moindre scrupule, se faisant traverser les époques en s’assurant toujours de ses bénéfices et elle ne comptait pas s’arrêter en si bon chemin avec cette tempête qui se déchaînait toujours un peu plus au-dessus de sa tête ainsi que de tous ceux que les humains vénéraient ou craignaient. Continuer pour survivre. Continuer pour s’assurer une place du bon côté de la barrière. Jusqu’à ce que la mortelle menace ne trouve un certain apaisement… définitif. Mais dans ce jeu auquel elle jouait depuis qu’elle s’était soustraite à l’influence des dieux pour leur guerre, ses habitudes pouvaient finir par la perdre et peut-être que ce soir amorçait cette chute.

Elle observait tour à tour les deux oupyrs qui se tenaient si proches d’elle tout en se révélant être si insaisissables. Ils étaient des alliés hier et ce soir mais combien de temps le seraient-ils ? Johannes suivait le plus offrant et cette jeune pousse suivrait celui qui l’avait changée mais à cet instant ce n’était pas l’argent ou sa promesse qui faisait rester le germain. Ils étaient loin d’être liés d’une manière sentimentale comme celle que les humains pouvaient autant s’épuiser à chercher. Ils avaient des points communs exerçant une attraction particulière sans toutefois les enchaîner l’un à l’autre. Chacun courrait après ses propres objectifs mais lorsque l’occasion se présentait, ils se retrouvaient et le sentiment d’avoir l’oupyr auprès était comme si… elle se sentait rassurée. Quelle ironie que de ressentir une dilection lorsque celui qui la provoquait n’était autre qu’une créature que la consommation de sang permettait de vivre. Lorsqu’il n’y avait non pas un mais deux oupyr, non loin d’elle et avec lesquels elle comptait panser ses blessures, laver l’affront d’avoir été empoisonnée et rejeter dans les méandres de sa mémoires le souvenir de cette chaotique soirée au jardin des Tuileries. Le sang avait coulé et les fleuves s’en rempliraient encore et encore.

Loin d’être rebutée à l’idée de partager sa couche avec plus d'un seul partenaire, Circé tendit doucement les bras vers les deux oupyrs, les appelant à elle, et la réaction de Johannes lorsqu’il se retourna lui arracha un rire léger. Ignorait-il à quels caprices pouvaient se donner les Grecs et les romains pour que les festins les plus inébriants prennent une tournure des plus passionnées ? Où ? Là où ils se trouvaient. Dans la chambre. Sur la terrasse, sous l’air mordant de la nuit. Peu importe, songeait-elle tandis qu’elle observait le germain laisser tomber sa chemise sur le sol, déboucler sa ceinture pour que son pantalon puisse choir à son tour, offrant alors une vision brute des plus agréables, quoi qu’incomplète. Un contact entre leur peau et un baise-main accordé à chacune d’entre elles, la grecque se rapprocha et leur lèvres vinrent s’unir de ce même embrasement d’ores et déjà connu. La main de Johannes glissant le long de sa joue puis de son cou tandis que la grecque défaisait peu à peu sa robe, un frisson parcouru son échine. Dieux qu’elle pouvait aimer autant ces moments que ceux emplis d’âpres négociations.

L’une après l’autre les deux femmes bénéficiaient de l’attention du germain et lorsque le tissus de sa robe tomba à ses pieds, Circé les entraîna vers la chambre. Accordant alors son attention vers la blonde, Alcina, dont les traits du visage et la douceur du grain de peau sous ses doigts pourraient sans le moindre doute arracher un rictus d’Aphrodite. Séparant momentanément l’étreinte entre les deux oupyrs, Circé fit s’asseoir Alcina sur le bord du lit avant de placer derrière elle et de ses mains, partir à la rencontre de cette partenaire d’un soir. Ce fut les yeux rivés sur le visage de Johannes que l’enchanteresse repris la parole.

- Je pourrais bien vous offrir quelques humains sur place, pour vous épargner de longues minutes de chasse, mais ils sont à moi et je ne suis pas toujours d'humeur généreuse, commença-t-elle avant de rapprocher ses lèvres de l’oreille de la jeune oupyr. Je doute pas que l’esprit allégé par ce petit changement de plan, vous saurez trouver votre bonheur aisément en dehors de ces murs, finit-elle avant de déposer un baiser sur la joue de la blonde.

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 QUE DIRAS-TU CE SOIR, PAUVRE ÂME SOLITAIRE

Que diras-tu ce soir, pauvre âme solitaire

La plupart de nos suspicions sont éveillées par ce que nous connaissons de nous-mêmes. --  feat @Johannes von Reiner et @Alcina Kowalski

S’employant avec minutie à affoler les sens de la jeune oupyr, autant par les gestes qu’en restant volontairement aussi proche d’elle pour que son parfum imprègne sa mémoire olfactive, un sourire satisfait vint étirer les lèvres de la sorcière grecque lorsque le germain se mouva pour venir sur le lit à son côté. Chacun d’entre eux aurait pu vaquer à ses propres occupations nocturnes, oubliant -pour deux d’entre eux- la douleur subie ce soir en se noyant sans la moindre retenue dans les excès, auprès d’inconnus dont l’utilité n’aurait été que le temps d’une nuit. La brune avait voulu que ce moment ne se produise pas en compagnie d'un anonyme et pour sa plus grande satisfaction, le sujet de son caprice s’était laissé tenter par cette offre faite, entraînant avec lui son enfant de la nuit.

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