Lucky Day, my dear. [Intrigue III - Terminé]

Lucky day, my dear.

“Les mondanités consistent à parler, quand on n’a rien à dire, avec des gens qu’on n’est pas obligé de rencontrer.” --  feat. @Alexander Gold

La soirée battait son plein comme tant d’autres depuis que le nom de l’établissement s’était envolé dans les rues de la capitale, se propageant toujours plus loin et attirant autant les plus désireux d’emporter un jackpot que ceux ayant un portefeuille des mieux fournis. La musique était présente sans qu’elle ne couvre toutefois les éclats de voix aux tables de jeux ou aux machines à sous, l’important restant que tous ceux présents puissent s’entendre penser et communiquer sans que l’irritabilité ne finisse par les amener de force au dehors. Les croupiers accomplissaient habilement ce pourquoi ils étaient payés, les barman au sourire éclatant et à l’énergie débordante s’employaient à faire des merveilles auprès des clients désireux de pouvoir se désaltérer, et la sécurité se chargeait de s’assurer que tout se déroulait sans le moindre accroc. Ce casino était son domaine, tout un chacun se trouvait d’une manière ou d’une autre sous ses ordres et il était hors de question que le moindre grain de sable ne vienne mettre hors de fonction cette machinerie qu’elle avait fait établir en plein cœur de Paris, à deux pas du célèbre cabaret Moulin Rouge. Eéa à l’échelle d’une maison de jeux, les métamorphoses soigneusement évitées.

Savourant ce délicat cocktail qui lui avait été préparé, Circé parcourait le livre de compte que le directeur lui avait apporté et aucune ligne ne trahissait un manque de contrôle sur ce visage qu’elle avait choisit pour prendre les rênes de l’établissement en son absence. Voilà ce qui serait un soulagement pour l’humain dont le masque de neutralité trahissait en certains points la crispation à l’idée qu’elle puisse être mécontente du travail qu’il produisait. A moins que son malaise ne soit produit par l’homme qui se trouvait quelques pas derrière lui, prêt à agir sur les ordres de sa patronne. Laissant un grand sourire étirer ses lèvres, la brune referma le document avant de le faire glisser sur le bureau, devant le directeur. D’un coup d’œil à Haydar, son bras droit, elle lui signala qu’il pouvait quitter sa position et il revint ainsi auprès d’elle.

- Beau travail directeur. J’aimerai qu’un tournois de poker soit organisé, 950€ de prix d’entrée minimum et pour le reste je n’ai pas besoin de vous dire quoi faire. Vous savez comment attirer de grands noms pour…

Quelques coups furent frappés à la porte du bureau avant qu’elle ne s’ouvre sur un des agents de sécurité vers lequel Circé tourna la tête, attendant qu’il explique la raison de sa venue.

- Madame, à la 1 nous avons un nouveau aux tirages chanceux.

Peut-être s’agissait-il d’un réel chanceux Blackjack ou peut-être que le croupier du soir n’était pas dans un bon jour et pouvait être lu comme un livre ouvert par ne serait-ce que les joueurs à minima observateurs. Prenant une profonde inspiration, elle laissa ensuite un léger soupir s’échapper de sa bouche puis prenant son verre en main elle se leva. Flanquée de son homme de main, elle suivi alors son agent hors du bureau pour retourner au rez-de-chaussée fourmillant d’activité et d’humains. Récupérant une boîte de jetons et le tour suivant à la 1 s’apprêtant à débuter, elle se joignit aux joueurs présents. Déposant cent cinquante euros de jetons sur la table à son arrivée, le croupier hocha la tête puis il se mit distribuer les cartes. Tout en reprenant une gorgée de sa boisson, Circé se laissa observer quelques instants le blondinet qui se trouvait sur sa droite, un visage qui ne lui semblait pas inconnu sans que toutefois sa mémoire ne puisse immédiatement mettre le doigt sur le nom auquel il était associé. Finissant par détourner le regard tandis que la banque dévoilait un sept de pique, elle souleva légèrement ses cartes pour jeter un œil aux deux reines qui s’y trouvaient puis elle les reposa telles qu’elles avaient été distribuées, passant sa main au-dessus des cartes pour signaler au croupier qu’elle conservait ses cartes.

- La soirée est-elle heureuse messieurs ? Je crois que l’un d’entre vous peut y répondre par l’affirmative, dit-elle avant jetant un coup d’œil à la pile de jetons se trouvant devant le blondinet.

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Les deux dames lui offraient un bel avantage face à la Banque, sans toutefois lui offrir une victoire directe, et en cet instant seule la carte se trouvant encore face cachée ainsi que le tirage amenant le croupier au-delà de la somme de dix-sept la séparait du résultat. Adressant un sourire ingénu aux hommes présents, son attention fut de nouveau attirée vers le blondinet qui semblait être présent afin de la rencontrer. Tout dans sa posture jusque dans l’intonation qu’il mettait dans ses mots clamait qu’il n’était pas de la même trempe que ceux qui les entouraient, il aurait servi d’atout charme sans le moindre effort pour le casino si seulement il n’y pas eu ce petit geste de soupçon lorsqu’il récupéra sa boisson apportée par un serveur. A quoi s’attendait-il ? Qu’elle l’empoisonne devant tant de témoin ? Qu’il découvrirait son secret du succès au travers d’une petite poudre blanche savamment saupoudrée au-dessus des verres pour donner un tonus aux boissons ?

- Que voulez-vous, je suis toujours attentive à ce qu’il se passe sur mon domaine, répondit-elle avant de prendre une nouvelle gorgée de son cocktail, reportant son regard sur le croupier. Faisait-il preuve de faiblesse ou l’homme aux cheveux d’or savait manier le bluff parfaitement ? Du coin de l’œil elle observa à nouveau le blondinet lorsqu’il chercha à savoir ce qu’elle comptait faire pour tenter de remporter sa mise. Un soupir amusé s’échappant de sa bouche, Circé laissa le joueur demander une carte puis augmenter sa mise à quatre-cents euros. Il était sûr de lui et de ce que la Banque pouvait sortir contre lui. Les autres joueurs prirent leur décision.

Un six de cœur s’ajouta au sept de pique. 13.

Une nouvelle gorgée de cocktail et elle haussa un sourcil lorsque Blond comme les blés s’adressa de nouveau à elle. Comptait-elle douter et prendre une carte, prenant le risque qu’il ne s’agisse pas d’un As ? Elle ne risquait pas de douter, non seulement perdre quelques centaines d’euros ne s’avérait pas une perspective insurmontable mais son esprit tentait de savoir si elle avait déjà pu apercevoir cet homme quelque part et quel pouvait être son nom. La réponse à cette question là était bien plus importante et ne pas la trouver rapidement serait fort agaçant.

- Pourquoi croyez-vous qu’il me soit nécessaire de prendre une carte ? répondit-elle avant de s’adresser au croupier d’une voix douce teintée de fermeté. Un peu de tenue, même un enfant sait mieux cacher ce qu’il a en tête que vous ce soir.

Le doute elle le voyait sur le visage du brun même s’il savait conserver sa neutralité professionnelle, il serait remplacé rapidement avant qu’un autre que Blondie n’en profite pour arracher tout ce qu’il pouvait à la Banque. Les traits du visage se tendirent légèrement, signe que ses mots s’insinuaient profondément dans l’esprit de l’humain, avant que les dernières traces de doutes ne disparaissent tandis qu’un roi de carreau était tiré par la Banque. 33. Retournant ses deux reines, elle récupéra sa mise. Prenant une profonde inspiration, loin d’être mécontente, elle senti une présence derrière son épaule gauche avant qu’un visage ne s’approche de son oreille pour lui souffler un mot. Luxuria. Si elle se figea un instant à l’évocation de cette multinationale versant dans le luxe, Circé termina le contenu de son verre avant de se tourner vers celui qui semblait donc n’être nul autre qu’Alexander Gold.

- Vous ne vous êtes pas annoncé. Dois-je en conclure que vous n'aimez pas les mondanités entre professionnels du milieu ? A moins que vous ayez une préférence certaine à faire venir à vous ceux avec lesquels vous souhaitez vous entretenir, en conservant une forme d'anonymat ? dit-elle tandis qu'elle rangea ses jetons dans leur boîte avant de la tendre à son bras droit. Se levant de son siège, elle tendit le bras à Gold. Peut-être devrions bien changer de jeu, finalement.

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Les cartes avaient été distribuées. Les mises avaient été posées. Tout se jouait au tirage de la Banque.

- Une envie soudaine ? Oh non, loin de là. Je m’adapte simplement au monde d’aujourd’hui, réagit-elle alors qu’à mesure où les secondes défilaient ils se rapprochaient de la fin de la partie. La Banque cramait. Deux joueurs aussi. Deux récupéraient leur mise et le bel Adonis à ses côtés remportait le double de ce qu'il avait misé. Chance ou bluff, elle devait reconnaître que cet aperçu qu'elle avait de lui portait à croire qu'il était doué dans ce qu'il faisait. Mais elle l'était tout autant et de ce qu'elle avait pu observer au fil des siècles qu'elle avait traversés, rares étaient les propriétaires de quoi que ce soit à se présenter à un concurrent de cette manière, rares étaient les humains à être réellement sûrs de leur pouvoir au point de se le permettre. Les dieux, en revanche, aimaient asseoir leur autorité sur tout ce respirait et ils n’en étaient que plus dangereux lorsque leur curiosité aussi bien que leur orgueil était piqué au vif. Dans le milieu des affaires, les humains aimaient être sous le feu des projecteurs, autant que les dieux qui avaient ce besoin viscéral d'être adulés mais ces derniers savaient faire preuve de prudence en ne révélant pas leur identité aux premiers venus. Encore moins lorsque les concernés pouvaient être du même monde.

- Je ne peux que comprendre votre volonté de protéger votre identité lorsque vous n'êtes pas certain de celle de votre interlocutrice, Monsieur Gold. Pourtant c'est vous méprendre que de croire qu'en sachant qui vous êtes, j'aurais pris la décision d'envoyer un subalterne, répondit-elle tandis qu'il venait lui serrer la main avec une grâce certaine, sans toutefois se priver d'y mettre un certaine fermeté. Il la relâcha un instant puis se détournant d'elle, il compta ses jetons avant d'en prendre une partie et de se tourner à nouveau vers elle, les ayant déposés sur sa zone de jeu. Un gage de bonne foi, vraiment ? Circé observa un instant les jetons avant de reporter son attention sur le visage du blondinet. Bien que l'étant à des degrés différents, les hommes étaient cupides par nature, une majeure partie d'entre eux -si ce n'était tous- ne prendrait la peine de lui rendre les jetons emportés : ce qui était gagné le restait. Qu’il le fasse faisait de lui un homme pas comme les autres et probablement autre chose qu’un mortel. Elle hocha légèrement la tête et d'un signe discret, laissant son homme de main s'occuper des jetons. Pourquoi donc devrais-je me présenter ? N'avez-vous pas effectué des recherches sur moi avant de vous rendre ici ? A moins que vous me le demandiez parce que vous n’avez pu trouver quoi que ce soit de discordant dans mes affaires et dans ce cas, vous cherchez à savoir à qui vous avez vraiment affaire.

A ces mots elle indiqua alors que blondinet de la suivre et le mena jusqu'à l'un des salons VIP du bar, non sans indiquer au serveur de leur apporter de quoi se sustenter et le "cocktail de la maison" pour son invité. Une simple garantie. L'invitant à s'asseoir, elle n'attendit pas qu'il le fasse pour elle-même s'installer, ce casino était sa propriété et elle ne comptait pas montrer le moindre signe de faiblesse devant ce qui pouvait être autant une créature des plus déterminés qu’un dieu des plus dangereux. Prenant une profonde inspiration et conservant un léger sourire aux lèvres, elle se pencha légèrement en avant, posant un coude sur la table avant de poser gracieusement son menton sur sa main.

- Bien. Nous ne sommes pas ce que nous paraissons être alors… qu'attendez-vous de notre échange, monsieur Gold ?

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S'adapter pour survivre était une nécessité pour chaque être vivant parcourant cette Terre, le faire devenait essentiel lorsque l'on se trouvait être une créature immortelle évoluant au milieux de dieux dévorants et d'humains se rebellant contre leurs idoles. Si elle n'avait cherché à s'approprier cette île sur laquelle elle avait été exilée, Circé savait qu'elle serait devenue folle et qu'elle se serait laissée dépérir. Si elle n'avait pas réagit face aux vices de cet équipage ayant souillé aussi bien son île qu'elle-même, elle aurait été asservie. Elle avait instillé la peur dans les coeurs des marins. Ses talents -à son grand dam, elle devait remercier Hermès- avaient été contés par Homère, inspiré par Calliope. Elle avait finit par sortir dans le grand monde, s'éloignant de la Grèce pour se faire une place, pour obtenir ce qu'elle souhaitait, et de se soustraire aux dieux. Elle s'était adpatée à cet univers en constante évolution pour traverser les époques sans être arretée : elle devait continuer à le faire, autant pour sa propre survie que pour les affaires qu'elle menait à cette époque.

Ce sourire, aussi charmant soit-il, avait quelque chose de glaçant qui mettait en alerte les sens de la sorcière. Celui qui tenait Luxuria était assurément un être doté d'une puissance -financière tout autant, l'évidence étant indéniable- et disposant d'un nombre important d'hommes de main pour accomplir le moindre de ses désirs. Il s'agissait donc d'un certain tour de force de lui soustraire des informations alors qu'il avait les moyens de déterrer n'importe quel secret de la proie qu'il s'était désignée. Ce soir, Circé sentait qu'elle était cette proie devant se faire dépouiller pour tout obtenir d'elle mais elle ne révélerait pas son identité tant qu'elle ne saurait qui se trouvait devant elle.

Ce ne fut qu'une fois qu'ils furent installés dans le carré VIP, un serveur leur apportant chacun un cocktail avant de s'éclipser pour revenir avec la suite, que leur conversation se poursuivit.

- Êtes-vous bien certain que vos hommes ont procédé à des recherches minutieuses ? Qui vous dit que de la magie n'a pas été à l'œuvre pour cacher les traces de mon passage ?

Après tout, sa magie lui permettait de charmer les esprits ou encore de métamorphoser les êtres au travers de potions, elle pouvait tout à fait se révéler être Hécate. Occulter tout ce qu'elle souhaitait cacher aux yeux de mortels trop curieux ou de divins trop dangereux, elle savait y faire.

Le regard posé sur le blondinet qui venait de porter vers lui son cocktail sans toutefois en boire ne serait-ce qu'une gorgée, Circé laissa s'échapper un rire léger avant de baisser les yeux sur cette veste rouge d'une apparente grande qualité. Il était méfiant -à juste titre- mais si elle ne parvenait pas à lui faire boire ne serait-ce qu'une seule gorgée, la discussion serait assurément menée par celui qui se trouvait en face d'elle. Un sentiment désagréable commençant à poindre, elle prit son verre en main puis le portant à ses lèvres elle bu une gorgée.

- Le cocktail qui nous a été servi a été étudié spécialement par rapport aux allergies. Mêlé au goût particulier de l'ouzo, vous sentirez aisément la liqueur de canneberge et le tout est adoucit par du sirop de grenadine et de l'eau gazeuse. Elle reprit une gorgée. Vous ne pouvez pas goûter plus grec qu'un cocktail à base d'Ouzo, bien que la grenade aurait été plus appropriée que la canneberge je l'avoue reprit-elle en lui adressant un clin d'oeil.

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Ne pas avoir le contrôle provoquait des sentiments que l’antique sorcière insulaire n’aimait pas connaître et c’était raison pour laquelle elle s’était toujours assurée d’avoir le contrôle sur ses domaines. Les humains cédaient si facilement qu’il était presqu’à croire qu’ils avaient été créés pour cela, les créatures faisaient preuve de plus de résistance et les dieux quant à eux devaient consommer de ses mixtures pour ne serait-ce que perdre un semblant de contrôle sur leur esprit. Celui qui se trouvait en face d’elle avait toutes les raisons du monde de se méfier d’elle et de ce qui pouvait lui être servit, tandis que de son côté Circé voyait en lui une menace qu’elle devait s’employer de ne pas libérer. Sous cette apparence d’Alexander Gold, qui était-il vraiment ? Probablement un ennemi, de ce que l’instinct de préservation de l’enchanteresse pouvait lui souffler. Mais lequel exactement ? Les celtes ne semblaient pas être doués pour mettre des formes dans leur approche, comme pouvait lui indiquer son souvenir d’Esus et de Taranis. Un nordique ou un slave n’oserait remettre en question l’alliance personnifiée par Loki. Les possibilités se réduisaient sans pour autant permettre de mettre un nom sur l’entité se tenant non loin d’elle.

- Si tel est le cas, j’ose espérer que vous les avez congédiés pour leur manque de compétences, répondit-elle tout d’abord avant d’hocher légèrement la tête, convenant du fait que pour certaines tâches, déléguer n’était toujours une solution viable. Mais trêve de rêvasserie, elle devait rester concentrée sur cet être qui était venu jusqu’à elle pour obtenir des informations.

Il n’y avait rien dans ce cocktail qui puisse provoquer des allergie et pourtant, Ken semblait obstiné à obtenir d’elle l’entièreté de la composition de sa boisson en clamant qu’elle mentait. Prenant une profonde inspiration elle bu une autre gorgée tandis que ce qui paraissait être une douce chaleur glissait sur son visage, venant se poser sur sa langue. Il répéta sa question, voulant la vérité pure, et elle posa son verre devant elle non sans plisser légèrement les yeux. Divin. Mais lequel ? Sa langue lui paraissait soudainement légèrement, comme prête à révéler ce que son propre esprit préférait conserver enfouit dans ses tréfonds. Etait-elle soumise à un pouvoir qui tentait de la lui délier ? Ainsi donc il s’agissait de cette sensation ressentie par les mortels lorsqu’elle utilisait sur eux son pouvoir de charme… Lorsqu’il reprit immédiatement la parole, elle haussa un sourcil.

Son casino venait d’attirer en son sein Diable en personne, ce n’était vraiment pas une affaire mineure. Outre les intérêts économiques qui pouvaient être touchés si elle engrangeait encore plus de recettes qu’à l’heure actuelle. Si elle se pinça un instant les lèvres, elle s’employa à rester de marbre.

- Je viens de vous énoncer la recette de votre cocktail, il n’y a rien de plus que mon amour de l’hospitalité, répondit-elle avant de reprendre son verre et de boire une nouvelle gorgée. Vous êtes le troisième démon que je rencontre en l’espace d’un millénaire, je vais finir par croire que je vous intéresse tous. Êtes-vous possiblement un partenaire d’affaires comme le premier ou une simple épine dans le pied comme le deuxième, Porteur de lumière ?

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A mesure que les secondes défilaient, l’esprit de l’enchanteresse repoussait l’information selon laquelle son invité de marque avait procédé à des recherches minutieuses à son sujet avant de mettre un pied au Thêta, pour se concentrer sur l’homme en lui-même. Ou plutôt le dieu puisqu’il venait de laisser sous-entendre qu’elle tentait d’empoisonner le Diable avec un simple cocktail contenant un soupçon d’hospitalité. Non, l’information la plus importante à retenir à cet instant précis était cette sensation qu’il venait de provoquer en elle. Quelque chose qui ne pouvait qu’exister lorsqu’un pouvoir était à l’œuvre et à la réponse qui lui fut arrachée Circé pu constater qu’elle avait su résister à ce qu’il avait voulu obtenir d’elle. Désormais il devait savoir à qui il avait affaire et elle savait tout autant qui se cachait sous cette enveloppe. Lorsqu’il prononça son nom, la grecque redressa légèrement la tête et s’employa à lui adresser un sourire satisfait pour masquer la prudence dont elle allait devoir faire preuve désormais. Elle connaissait chaque personnalité des dieux de son panthéon, pu entrapercevoir celle d’autres dieux, et aussi imprudente pouvait-elle être, en cet instant il s’agissait d’une catégorie tout autre.

- Que voulez-vous… lorsque l’on vit durant des millénaires, il faut savoir diversifier ses activités, répondit-elle tout d’abord avant de prendre une énième gorgée de son cocktail. Je n’oserais pas vous insulter, je tiens bien trop à mon existence pour la voir être écourtée sans que je n’ai pu le prévoir. Prenant une profonde inspiration, elle s’étira langoureusement avant de s’adosser contre le dossier de son siège tandis que le Déchu se penchait en avant, posant ses avant-bras sur la table. Ces yeux, un vrai regard à ce damner si l’on omettait que leur éclat n’était qu’un aperçu de la force mortelle qui se cachait sous ce corps. Tandis qu’il lui demandait qui étaient les deux premiers démons qu’elle avait rencontrés, Circé posa un coude sur son dossier et commença à jouer avec une mèche de ses cheveux. Etait-il jaloux de ne pas être le premier ? Ou bien voulait-il obtenir des noms pour les punir de l’avoir laissée en vie ? Oh juste cette ancienne divinité païenne ayant rejoint vos rangs démoniaques. Comment s’appelle-t-il déjà ? Ah oui, Belzébuth. Quant à l’autre, il ne s’agissait que d’une succube. Comment réagirait-il s’il apprenait qu’elle avait un accord avec le démon ? Mieux valait qu’elle le présente comme une rencontre ne l’ayant que peu marquée… même si ce serait mentir en disant que Belzébuth était aisément oubliable. Repoussant son verre à moitié vide, Circé se pencha à son tour en avant. Des services contre la garantie de poursuivre mon commerce avec le casino sans être importuné, hmm… Quels services pourrait bien accomplir une sorcière grecque pour le roi de l’Enfer ?

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Etendre son domaine, c’était empiéter sur celui d’un autre prendre le risque de tomber sur une opposition plus forte qu’attendue. En l’état, elle empiétait sur le domaine de Gold et ce dernier était venu jusqu’à elle pour lui montrer qu’il ne la laisserait pas agir comme bon lui semblait. Elle n’aimait pas le savoir mais s’il ne la menaçait pas en cet instant précis, tout pouvait basculer en un claquement de doigt si elle n’y prenait pas gare. Restant pondérée dans ses propos malgré sa nature l’amenant à se jouer de ses interlocuteurs, elle fit preuve de sincérité lorsqu’elle lui fit part de sa volonté à ne pas mourir bêtement ce qui ne sembla pas déplaire à l’être divin qui chercha à en savoir plus sur elle. Se montrant toujours charmeur pour obtenir d’elle ce qu’il voulait. Oui elle avait rencontré Belzébuth et ils avaient tous deux pu explorer en profondeur ce que chacun pouvait apporter à l’autre, mais elle ignorait ce que Lucifer penserait de cette entrevue datant de plusieurs siècles. Lorsqu’il se redressa légèrement, son regard brillant désormais d’une lueur libidineuse, Circé eut comme le sentiment que les deux démons étaient très proches et que Belzébuth était plus qu’un subalterne parmi tant d’autres.

- Il sait explorer les problématiques en profondeur, répondit-elle avant de se concentrer sur la partie la plus sérieuse de leur conversation : les services. S’il y avait bien une chose qui était complexe avec les dieux en plus de leur considération, c’était leur parole : si avec certaines créatures accordant des vœux il fallait être précis, il en allait de même avec eux. Le moindre manque de précision était semblable à laisser la porte de sa demeure grande ouverte avec plusieurs milliers d’euros de biens matériels en évidence, c’était leur laisser l’opportunité de prendre plus que ce qu’ils n’auraient dû en premier lieu. Alors lorsque Lucifer en personne lui proposait de continuer à prospérer avec le Thêta en échange de services, la grecque ne pu que chercher à savoir ce que cette coopération de sa part signifiait. Elle vit la malice s’éteindre quelque peu dans le regard du Roi des démons et un masque de sérieux venir figer les traits de son enveloppe. Constatant qu’elle avait posé la bonne question, Circé retint un sourire satisfait pour à son tour laisser le sérieux s’installer sur son visage et elle l’écouta avec la plus grande des attentions.

Cela devait faire deux bons millénaires que l’Unique avait décidé de ravir les fidèles des anciennes divinités et plusieurs bonnes semaines qu’une nouvelle guerre avait été déclarée au travers de la bouche de l’Evêque de France. Il n’était donc pas étonnant que l’ange déchu en fasse la mention, appuyant le fait que chaque dieu ne ployant pas le genou face à un émissaire de l’Unique verrait son enveloppe être détruite. Certains dieux méritaient bien de faire un tour dans cet environnement immatériel qu’était l’Ether. La curiosité de Circé fut piquée lorsque son interlocuteur mentionna son opinion concernant l’existence des créatures, quelles qu’elles soient. Mensonge pour l’amadouer ou vérité ? Conservant son coude sur le dossier de son siège et continuant de jouer avec une mèche de cheveux, Circé laissa un sourire amusé étirer ses lèvres tandis que Lucifer laissait un silence s’installer entre eux. Voilà bien quelque chose qui aurait pu être fait par Loki, le dieu de malice semblant friand d’effets dramatiques de ce qu’elle avait pu constater de ses propres yeux. Le Diable laisserait donc le casino tel quel et n’interfèrerait pas avec son activité à condition que dès les instants qui suivraient leur conversation, elle lui donne les identités humaines des dieux qu’elle rencontrerait.

- Vous donner l’identité humaine de dieux, pour que vous puissiez les traquer et les abattre plus aisément, afin que je puisse continuer à exploiter ce casino ? Elle laissa un rire léger s’échapper de sa bouche tandis qu’elle détournait légèrement le visage pour poser son regard sur le reste de la salle qui fourmillait de vie. Finissant par relâcher sa mèche elle reporta son regard sur ce diable de blondinet et posa à son tour ses coudes sur la table. Ce n’est pas très équilibré comme échange. Si je vous donne des noms, je ne veux pas seulement pouvoir continuer à faire tourner ce casino sans que vous mettiez votre nez dans mes affaires… aucun de vos sbires quelque soit leur grade dans votre infernale hiérarchie, ne doit sans prendre à moi et mes intérêts, cela inclus les humains qui me sont les plus proches. Elle accrocha son regard avec sérieux avant qu'un nouveau sourire ne vienne étirer ses lèvres. Il est flatteur que vous me proposiez de vous servir de moi pour abattre vos ennemis.

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Cette lueur libidneuse dans le regard, combien de fois avait-elle pu la voir dans les yeux des hommes au cours de son existence ? Bien de trop de fois pour en faire le compte à cet instant précis. Mais cela trahissait ne pas une envie à satisfaire, cela ressemblait à une forme d'intérêt induite par un quelconque pari ou des paroles rapportées. Belzébuth ne semblait pas avoir parlé d'elle, et c'était tout à son honneur, ce qui voulait dire que l'ange déchu venait trouver un sujet sur lequel il pouvait se plaire à provoquer l'agacement chez son démon. Aux mots de Lucifer, elle laissa un rire léger s'échapper avant de plisser légèrement les paupières lorsqu'il sortit son téléphone pour envoyer un message. Etait-ce pour prévenir des hommes de se tenir prêts ? Ou envoyait-il un message à Belzébuth la concernant ? Lorsqu'il rangea son téléphone dans la poche intérieure de sa veste, cela marqua la fin de cette parenthèse légère -si cela pouvait être le terme approprié- car si celui qui dirigeait l'Enfer du Dieu unique était venu ce soir, ce n'était pas pour discuter de performances physiques de son subalterne il y avait près de sept-cent ans. Non, le sérieux était de mise et la tournure de la conversation pouvait rapidement prendre une tournure défavorable pour la grecque car rien ne garantissait qu'il ne s'arrête pas à la destruction du casino, en tant que riche hôtelier il pouvait tout autant s'en prendre à son activité principale. Et ça, elle ne le permettrait pas. L'ange déchu voulait des noms divins en échange de la survie du casino, un marché qui n'était pas des plus équilibrés si elle n'avait pas la garantie que par la suite nul ne viendrait s'en prendre à elle et ses intérêts. Des noms pour seulement tenir à l'œil les dieux concernés. Voilà qui était surprenant mais qui était-elle pour juger les plans des divinités officiellement ennemies de son panthéon et de tous les autres ?

- Vous semblez en effet avoir une certaine liberté dans vos actions, contrairement à vos frères qui obéissent à votre père sans sourciller. Elle reprit son verre en main et bu une nouvelle gorgée de sa boisson. Je suis ravie de constater que nous ne rejetez pas cette demande et je ne manquerais de vous informer si l'un d'entre eux outrepasse vos ordres. Pour ce qui est anges, j'en fais mon affaire et puis... ils ont bien trop d'ordres auxquels répondre, je ne suis la priorité de qui que ce soit.

Un homme, qui ne faisait aucunement partie de son personnel, entra dans le carré VIP et tendit un verre de whisky à son patron. Alors peut-être que le sms qu'il avait envoyé n'avait été que pour demander une boisson à son chauffeur. Circé observa Lucifer prendre le verre et venir trinquer avec le sien avant qu'il ne reprenne la parole. Fournir l'identité des nouvelles enveloppes, c'était attendu, mais bénéficier de la protection du roi suprême des démons en se rendant dans n'importe lequel de ses hôtels ? Ça, s'était surprenant. Elle l'observa sortir une carte noire et rouge de sa veste, portant son écriture. Avaient-ils un marché ? L'enchanteresse grecque prit une légère inspiration avant de laisser ses lèvres s'étirer en un fin sourire alors qu'elle tendait la main pour prendre cette carte. L'observant un instant tandis qu'il reprenait la parole, mentionnant à quel points les dieux avaient pu la sous-estimer, elle repporta son regard sur Lucifer.

- Les dieux ont tendance a cruellement sous-estimer leurs créations ou les déconsidérer, quand toutefois ils ne les craignent pas. Je suis certaine que vous ne ferez pas la même erreur qu'eux. répondit-elle tout d'abord de lever un bras et de le baisser rapidement, prévenant son second -qu'elle savait aux aguets- qu'il pouvait s'approcher. Au bout de quelques secondes, elle le vit apparaître dans son champ de vision et elle le laissa se poster près d'elle. Bir kalem ve bir parça kağıt, demanda-t-elle avant qu'il ne fouille dans sa veste pour sortir un stylo et un bout de papier vierge. Tapotant un instant ses lèvres avec le stylo, elle se demanda par où elle pouvait commencer. Dans l'immédiat ? Satisfaire ses propres dieux en mettant sur la sellette un ennemi tout en satisfaisant cet "allié" contractuel. Elle commença à rédiger, un premier nom de divinité ainsi que celui de son enveloppe puis un second nom. Marché conclu mais... ne vous habituez pas trop à une telle quantité à chaque "rapport". Je suis purement grecque alors je n'ai pas la discipline rigoriste romaine, j'aime prendre mon temps pour mieux savourer, déclara-t-elle en posant le stylo avant de faire glisser le papier vers l'ange déchu. Il valait mieux qu'elle évite d'en dire trop aussi rapidement, il était certain que la durée du contrat tenait à l'alimentation régulière en noms : trop rapide et elle perdait, trop lente et il perdrait de son intérêt envers elle.

Louis Tessier, Taranis.
Maël Eschene, Esus.

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“Les mondanités consistent à parler, quand on n’a rien à dire, avec des gens qu’on n’est pas obligé de rencontrer.” --  feat. @Alexander Gold

Il suffisait d’un rien pour attirer l’attention des mauvaises personnes, Lucifer en incarnait le parfait exemple, et pourtant elle restait persuadée que face aux nombreux dieux greco-romains qui composaient le panthéon, elle était loin de constituer une cible prioritaire. Du moins pas un objectif à abattre prioritairement. Préférant ne rien ajouter aux mots du roi des démons, Circé préféra se concentrer sur cette carte qu’il venait de lui donner et qui commençait à s’enflammer doucement entre ses doigts pour laisser apparaître un numéro de téléphone. Les séides l’Unique… quels esbroufeurs ils pouvaient faire quand ils s’y mettaient. Faire attention à ce qu’elle pourrait lui écrire, évidemment : elle ne tenait pas à ce que ses communications avec lui soit interceptées par les mauvaises personnes. Si urgence il y avait elle devrait utiliser des lettres manuscrites, soit… elle se plierait à cette condition.

- Entendu. Et je vous ferais parvenir ces écrits par mon bras droit, c’est un humain et il est sous mon contrôle. Il suivra scrupuleusement les ordres donnés, y compris de malencontreusement oublier qu’il a transmis le message si quelqu’un d’autre que moi le lui demande, ajouta-t-elle avant d’aborder la déconsidération dont les dieux pouvaient faire preuve à l’égard de leurs créations et Lucifer lui adressa un clin d’œil en mentionnant son opposition à son Père puis « l’aventure » qui avait découlé de son bannissement. Il faut croire qu’avoir été bannis nous a forgés à notre manière.

Puis il fut temps de donner, comme convenu, un premier nom à Lucifer. Appelant son bras-droit, Circé prit un stylo et un papier avant de commencer à rédiger non pas une identité d’enveloppe humaine mais deux. Il ne s’agissait que de surveillance dans un premier temps, de fait elle ne portait atteinte de quelque manière que ce soit aux deux divinités celtes avec lesquels elle avait contracté un contrat de sang pour un misérable morceau de parchemin plus important pour eux que pour elle. Deux noms mis sur la sellette, deux noms qui seraient une épine en moins dans le pied de son panthéon et peut-être serait-elle récompensée à la hauteur de ce service qu’elle leur rendait. Faisant glisser le papier vers le blondinet, l’enchanteresse l’observa le prendre pour lire son contenu avant de le ranger dans la poche intérieure de sa veste. Il reprit la parole et Circé hocha la tête.

- Cela va de soi, répondit-elle en se levant à son tour et de lui rendre son sourire tandis qu’il la saluait avant qu’il prenne son verre et se mette en marche pour quitter le casino. Elle se tourna alors vers Haydar, laissant de sa magie imprégner sa voix : Il n’est jamais venu ici, entendu ? Lorsque le turc hocha la tête, elle lui accorda une douce tape une l’épaule avant de s’éloigner et de retourner dans son antre.

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