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La journée avait été longue et comme bien souvent emplie de cas provoquant une charge mentale qui se révélait rapidement épuisante. Il avait impossible de compter le nombre de pas qui avaient pu être effectué alors qu’il avait fallut procéder aux nombreuses consultation de patients souffrant de pathologies génétiques -pour la plupart habitués à venir quand d’autre découvraient ce mal qui s’était réveillé- ou encore au cours de tous ces aller et retour entre le bureau et le laboratoire d’analyses. Tous les membres du services avaient tous plus ou moins été éprouvés par cette journée qui venait de s’écouler et même si la fatigue commençait à se faire sentir, tirant les muscles des jambes, ils s’étaient tous accordés sur le fait qu’ils avaient besoin de sortir dans les rues de Londres. Pour s’amuser. Pour chasser de leur esprit durant quelques heures les pleurs entendus, les analyses effectuées, les radios prises. Et la capitale regorgeait des lieux dans lesquels il était possible de pleinement se libérer. Camden, ses nombreuses boutiques aux décorations insolites, ses petits concerts et son marché. Soho, ses restaurants et ses bars gays. Ou encore East London et ses discothèques on ne peut plus branchées.

Là non plus Shiobán n’avait pas compté les pas qui l’avaient menée dans plusieurs boutiques puis bars avant de descendre à nouveau dans le métro pour finalement arriver au Kensington Roof Gardens avec cette immense terrasse donnant sur le parc de Kensington. Un lieu parfait pour profiter de la vue, des boissons et de la musique qui s’échappait des enceintes disposées à des endroits stratégiques. L’alcool circulant dans les veines depuis une bonne heure déjà, certains jeux de lumière donnaient parfois le tournis à certains qui s’arrêtaient un instant de danser pour aller s’asseoir tandis que les autres continuaient en fermant les yeux le temps que la sensation s’éloigne. A combien de cocktails était-elle rendue ? Elle n’en avait pas la moindre idée, seul son compte bancaire saurait le lui dire demain ou le surlendemain. Tout ce qu’elle savait était qu’ils étaient délicieux et que ce barman savait sacrément bien vendre le contenu de la carte de l’établissement. Boire. Danser. Boire à nouveau avant de se laisser emporter sur les rythmes de musique qui se succédaient parfaitement. Être entourée de ses collègues. Des hommes tentant leur chance et être ignorés. Telle était la recette d’une soirée prometteuse.

A cet instant Shiobán ne songeait pas à tout ce qui pouvait être source de calcul, de prudence ou bien de problème. L’hôpital n’était plus. Saraquiel était quelque part en Afrique du Nord. Elle était donc tout simplement libre. Un homme finit par attirer son attention. Pete, si elle avait bien entendu. Cela faisait quelques minutes qu’ils dansaient ensemble et elle n’avait probablement pas dû le quitter une seule fois des yeux depuis qu’il s’était approché d’elle. Bon danseur. Charmant. Ne pouvait-elle pas se laisser à plus qu’un flirt aux yeux de tous ? Se rapprochant de lui, elle vint lui murmurer quelques mots à l’oreille et lui adressant un sourire elle l’invita à la suivre. Pour quelques jours elle était affranchie de son devoir, elle pouvait et avait besoin de se laisser aller. Et alors qu’ils entraient dans les toilettes, elle se laissa être enlacée, embrassant cet homme qui la tenait sans se douter un seul instant que cette soirée si prometteuse allait prendre un cours bien différent.

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Il existait plusieurs autres endroits dans lesquels il était tout à fait possible de se laisser tomber dans les bras d’un homme le temps de quelques minutes ou de quelques heures. Il y avait tout la praticité que pouvait offrir une chambre d’hôtel dans le quartier bien que le hic puisse être le prix de la chambre et le fait d’être vue par des connaissances ; son appartement quant à lui offrait une surface relativement respectable pour garantir l’amusement et un calme incomparable avec les murs à l’épaisseur discutable des hôtels. Mais il y avait là aussi un hic : et si l’homme sur lequel elle venait de jeter son dévolu était un cleptomane à ses heures perdues ? Et l’appartement de ce Pete ? Elle pourrait se frapper le front de la paume de sa main si toutefois elle était capable de réfléchir convenablement. Il fallait croire que pour les esprits embrumés une certaine consommation d’alcool depuis le début de la soirée, rester sur place semblait être le lieu parfait pour céder à pas moins de deux des sept pêchés capitaux. Après tout, seuls quelques mètres séparaient la piste de danse intérieure des toilettes : il était donc bien plus aisé de s’y rendre pour les différentes envies pressantes qu’il était possible de ressentir dans une telle soirée et en telle compagnie.

Entourée des bras de Pete lorsqu’elle entra dans la pièce enfermant une rangée de toilettes sécurisés, il ne fallut guère plus que le « bang » de la porte se refermant derrière eux pour que Shiobán n’encourage cette proximité entre leurs corps. Mains se faisant exploratrices. Baisers fiévreux. Respirations rendues courtes par l’empressement avec lequel ils se dirigeait vers le toilette le plus proche mais alors qu’elle sentait son dos commencer à pousser la fine porte, elle cru entendre la porte d’entrée s’ouvrir puis se refermer. Pourquoi s’en préoccuper, il ne devait pas être rare que ce genre de situation survienne ? Sentant sa robe remonter peu à peu le long de ses cuisses, elle se concentra sur ces lèvres qui s’offraient à elle. Cesser d’être sérieuse quelques minutes. Profiter simplement de ce qu’elle avait contre elle. Une voix s’éleva, l’amenant à poser son regard sur cet homme qui venait d’entrer. Il s’excusa. Soit. Mais ses capacités cognitives quelques peu ralenties par les cocktails commencèrent à décrypter ce qui avait été dit avant les excuses. Il cherchait le jouet d’un archange ?!

Alors qu’elle sentait les lèvres de Pete partir à l’assaut de sa gorge, Shiv le repoussa doucement jusqu’à ce qu’il s’arrête complètement ; elle se donna ainsi quelques fractions de seconde supplémentaire pour réfléchir à ce qui venait d’être dit, pour quelles potentielles raisons mais surtout par qui. Impossible qu’il s’agisse d’un déicide, il ne serait pas assez stupide -même saoul- pour crier haut et fort cette mission qui était la sienne. Bordel. Un divin ?! Ou un affilié ? Elle déglutit et s’employa à reprendre contenance, même s’il devait avoir vu qu’il venait de la déstabiliser : avec un peu de chance il pourrait croire que c’était parce qu’elle avait été prise sur le fait.

- Peut-être que je l’ai vu mais je suis probablement trop soûle pour m’en rappeler. Connaître le nom de qui cherche un tel jouet pourrait m'aider à me rafraîchir la mémoire, répondit-elle alors qu’elle repoussait le visage de Pete qui s’approchait à nouveau d’elle.

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Cet homme qui venait de faire irruption dans les toilettes du night-club une attitude qui trahissait un certain amusement quant à la situation qu’il venait d’interrompre. Etait-ce parce qu’il était de ces voyeurs aimant assister aux ébats des autres ? A moins qu’il ne s’agisse d’un proche de Pete cherchant à savoir si son ami conclurait ce soir ou non, s’amusant alors sans porter une grande importance à l’issue. L’esprit quelque peu embué par l’alcool, encore soumise aux effets de la dopamine et de l’ocytocine déclenchées par les attentions de son amant du soir, elle ne savait pas vraiment quoi penser de cet inconnu ni ce qu’il cherchait n’était qu’une blague ou s’il pouvait s’agir d’une vérité pouvant la mettre dans une position plus que délicate. Il cherchait le jouet d’un Archange, il savait donc qu’un archange frayait avec une humaine sans toutefois connaître les identités de chacun ? Pour obtenir des réponses elle allait devoir jouer sur son état ébriété, prenant le risque que lui aussi se mette à jouer de manière plus ou moins directe, plus ou moins agréable. S’il était là, c’était qu’il avait un bon instinct. S’il posait la question, c’était qu’il avait un doute ou qu’il voulait la mettre sous le feu des projecteurs.

L’inconnu s’avança et vint s’asseoir sur cette longue plaque de marbre constituant le meuble accueillant plusieurs vasques. Un sourire amusé étira ses lèvres. Etait-ce en réaction aux tentatives de Pete de reprendre là où elle les avait arrêtés ? Ou bien était-ce en réaction à ce qu’elle venait de lui dire ? Elle se passa une main dans les cheveux et s’éclaircit la gorge.

- Oh je vois, difficile de passer inaperçu avec des ailes dans le dos, eut-elle le temps de réagir avant qu’une énième tentative de Pete de se rapprocher d’elle ne fasse réagir l’inconnu dans ce qui semblait être une intervention chevaleresque. Si elle omettait l’intérêt qu’il pouvait trouver à se retrouver seul avec elle. Croisant les bras contre elle, Shiobán observa le grand brun poser les pieds au sol et s’avancer vers d’eux à grands pas, venant poser une main sur l’épaule de Pete. Faire d’elle tout ce qu’il voudrait, après… Si toutefois elle en avait encore envie après cette conversation qui s’annonçait. A moins qu’au contraire, elle en ait grandement besoin. Les lèvres pincées elle observa Pete être raccompagné à la sortie de manière courtoise et elle prit une grande inspiration lorsqu’une fois la porte fermée, l’inconnu se retourna vers elle.

Où en étaient-ils ? A nul autre moment que celui où il devait lui faire prononcer le nom de l’archange qu’elle côtoyait. Putain. Il ne lui voulait aucun mal… ce n’était pas comme si en ces temps foutrement troublés n’importe qui était possiblement un adorateur des anciens dieux, que n’importe quel dieu pouvait faire un coup d’éclat en milieu de la rue. Fait chier. Elle leva les yeux au ciel avant de se diriger vers l’un des lavabos.

- Bénie de quoi ? De ses divines attentions ? De sa céleste semence ? répondit-elle tout d’abord, ouvrant le robinet pour faire couler l’eau et se rafraîchir un peu la nuque. Il m’a dit que des frères, il en avait beaucoup. Certains plus vertueux que d’autres. Certains punis plus que d’autre par Lui. Pourquoi l'un des frères de cet archange se donne-t-il la peine de venir ici ? N'y a-t-il pas des fidèles à mener sur le droit chemin ? reprit-elle avant de finir par l'observer par le biais du miroir.

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A quoi jouait cet homme ? Elle l’ignorait. Tout ce qu’elle savait était qu’il l’avait recherchée et que désormais il voulait savoir avec lequel de ses frères elle pouvait bien partager une proximité charnelle. Les anges étaient loin d’être les êtres vertus que la croyance populaire dépeignait et ils pouvaient se montrer des plus obtus lorsque les situations auxquelles ils étaient confrontés n’entraient pas dans leur ligne de moralité. Ceux qui semblaient être les plus flexibles sur cette question étaient sans la moindre surprise les démons, qui se plaisaient allègrement à semer le chaos lorsque cela était possible pour eux. Cet homme était-il donc un archange ou un démon ? Un des puissants ou un néphilims ? Dans tous les cas il lui fallait rester sur ses gardes : s’il ne lui importait que peu que Saraquiel puisse être puni pour frayer avec une humaine, elle s’inquiétait surtout des risques qu’elle perdre une source d’informations fiable et qui lui offrait tout de même une protection bienvenue. Probablement poussée par sa forte consommation d’alcool ce soir et la présence de Pete, elle joua donc la carte de l’ignorance allant même jusqu’à plaisanter sur le manque de discrétion dont pouvait faire preuve un ange.

Mais il s’agissait-là d’un jeu auquel elle ne pouvait jouer bien longtemps, à peine son presqu’amant sorti de la pièce et qu’elle se fut rafraîchie avec un peu d’eau, la conversation prit une tournure plus franche bien que chacun de l’autre côté puisse encore garder de nombreuses informations. Elle le vit se rapprocher d’un lavabo puis poser les mains sur le marbre.

- Il le peut et dans l’intimité, je suis même certaine que celui faisant mieux que lui n’est pas prêt d'exister, réagit-elle avant de poursuivre sur la question de la fratrie. YHWH avait créé de nombreux anges, bannis un certain nombre lors de la rébellion de Samaël alors déterminer lequel des frères de Saraquiel se trouvait devant elle était une réflexion délicate à mener à son terme. Dans un premier temps elle adressa un clin d’œil au beau brun. TaNaKh, Talmud, Midrach… j’avais tout de même une bonne base avant de rencontrer votre frère.

Prenant une serviette en papier pour essuyer ses mains, elle laissa « l’homme » répondre à ses questions. Ainsi donc ce moment n’était qu’une pause dans le cour de son existence divine et de ses devoirs associés ? Il n’était pas spécialement présent pour elle… le hasard avait alors momentanément joint leur chemin ? Elle se tourna pleinement vers lui, essuyant les dernières gouttes d’eau sur ses mains puis elle posa le papier sur le marbre. Charmante compagnie, tiens donc voilà qu’il lui faisait un compliment. Minaudant un instant Shiobán se rapprocha de lui tandis qu’à nouveau il essayait de l’amener à lui révéler l’identité de l’ange dont elle était proche. Elle l’observa longuement avant de prendre une profonde inspiration.

- Voici ce que je vous propose : je vous donne mon nom et vous me donnez le vôtre. Je vous révèle deux noms d’anges pouvant être celui qui vous intéresse, vous m’en donnez deux dont celui qui est le vrai vous. Cela vous semble-t-il équitable ? dit-elle non sans poser sa main sur celui qui semblait donc être un divin du panthéon monothéiste.

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Parmi la multitude d’êtres humains vivant à travers le monde dans des zones aussi caniculaires que glaciales, le nombre de dieux et de leurs abominations n’était rien d’autre que l’équivalent de quelques seaux d’eau jetés dans l’océan. Bien que ces derniers temps croiser le chemin d’une divinité semblait être une probabilité qui se faisait de plus en plus forte, il n’en restait pas moins que cela restait d’autant plus si la rencontre n’était pas recherchée. Chassant comme elle pouvait les effets de l’alcool qui la désinhibait, Shiobán se forçait à se concentrer sur cet homme qui semblait tant vouloir connaître l’identité de l’archange qu’elle fréquentait. Il avait voulu savoir si elle avait été bénie et probablement influencée par l’alcool, ce qu’elle répondit fut prit pour vérité sortant de la bouche de l’ange dans le but de la séduire. Si elle avait pu, elle aurait frissonné de dégoût : c’était typiquement le genre de mots prononcés par les pires lourdingues existant. Poursuivant sur le thème de l’intimité, mentionner les exploits sexuels de son « frère » semblait ne pas laisser l’inconnu si insensible que ça, ce dernier levant les yeux aux ciels comme n’importe quel frère se moquant de ce que l’autre pouvait faire.

Un sourire en coin étira les lèvres de la brune avant qu’elle ne réagisse à la mention de cette « base » qu’elle possédait. Si aux yeux du monde elle apparaissait comme une généticienne de confession juive, trouvant ses origines en Allemagne, elle était une déicide convaincue que la liberté humaine se trouverait dans l’anéantissement total des dieux anciens et YHWH et ses légions en personne. Le judaïsme, le catholicisme, l’islam et toutes ces religions païennes n’étaient que des carcans enfermant la volonté propre des humains, des carcans qui ne servaient que de couvertures pour celles et ceux qui ne cherchaient à atteindre qu’un seul et même but : tuer des dieux. A la mention de la Bible, Shiobán ne pu retenir un rire léger tandis qu’elle chiffonnait cette serviette en papier désormais imbibée d’eau avant de la jeter dans la poubelle se trouvant sous le long meuble. Mais elle ne pourrait pas échapper bien longtemps à cette question dont il voulait tant entendre la réponse. Désormais proche de lui, la main posée sur la sienne, elle lui proposa alors un jeu. Equitable. Saraquiel avait de nombreux frères, certains ayant été autrefois déchus et ils étaient ainsi devenus des démons. Des plus vertueux, elle devait se méfier. Des plus démoniaques, tout autant.

Conservant son regard sur le brun, Shiobán lui dédia toute son attention. Profiterait-il de son état d’ébriété pour lui mentir ? Lui dirait-il au contraire la vérité, sachant qu’elle pouvait prendre ses mots pour mensonge ? Il sembla réfléchir un instant et deux quittèrent sa bouche : Azazel et Belzébuth. Un démon donc… Elle prit une profonde inspiration, elle se laissa appuyer sa hanche contre le meuble et croisa les bras sur sa poitrine. Etait-elle déçue ? Etait-elle satisfaite ? Elle l’ignorait mais elle laissa toutefois un sourire apparaître à nouveau sur son visage.

- Le dixième des anges déchus ou la divinité adorée des Philistins et Phéniciens devenu démon… Hmm je ne saurais dire lequel des deux vous êtes. Mais vous avez joué le jeu alors c’est à mon tour, commença-t-elle en le regardant sous toutes les coutures avant d’à nouveau accrocher son regard. Je me nomme Shiobán et le nom de l’ange est soit Saraquiel, soit Remiël.

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L’un comme l’autre observait ce que les mots de chacun pouvaient provoquer comme réactions, la seule différence étant que l’alcool pouvait l’amener à trop en dire si Shiobán n’y prenait pas garde. Si la finalité de ce travail qu’elle effectuait auprès de Saraquiel devait assurément être fatale pour l’ange, elle ne souhaitait pas pour autant mettre en danger sa mission et de fait se mettre en danger plus qu’elle ne le pouvait déjà le faire. Rien n’était évidemment sans risques mais il était possible d’en éviter un maximum en faisant preuve d’un minimum de prudence et d’intelligence, ce qu’elle ne faisait pas totalement en cet instant. Alors que ses yeux observaient les traits du visage de cet homme, rien n’indiquait une réflexion liée à un mensonge ce qui en soit avait ce petit quelque chose de curieux. Les démons n’étaient-ils pas reconnus pour leur art de la duperie ? Ou bien aimaient-ils dire la vérité sachant que leur nature les associaient de facto au mensonge et qu’une telle réflexion instillerait le doute dans les esprits ? Il lui paraissait honnête alors elle décida d’en faire de même, décidant de ne mentionner que le nom des archanges reconnus pour leur propension à épouser des humaines.

- Mais il a su regagner sa place après avoir participé à la rébellion de Samaël, n’est-il pas ?

Elle n’était pas idiote : elle savait qu’il avait déduit l’identité de l’archange auquel elle était attachée et il serait plus que coûteux d’obtenir son silence à ce sujet. Toujours appuyée contre le meuble, elle ne bougea pas lorsqu’il étendit son bras vers elle pour lui saisir la main et se rapprocher. D’un certain point de vue il lui était possible de se considérer comme étant chanceuse car peu de ses camarades déicides avaient naturellement croisé la route d’être divins, en dehors de leurs activités, et aussi parce que cela représentait une autre possibilité d’obtenir des informations. Et d’un autre côté peut-être était-là une punition pour ses activités car ajouter une nouvelle divinité graviter autours d’elle c’était accroître le risque que ses secrets soient révélés au grand jour. Dans le meilleur des cas la capsule de cyanure serait une garantie de ne pas tomber entre les mains de l’ennemi et de révéler des informations sensibles qui mettraient un terme à l’existence de l’Organisation. Annihilerait tout espoir de libérer l’humanité du joug des dieux païens comme du Dieu unique.

Aux mots du divin, Shiobán ne pu s’empêcher de rire. «On ». « Être ailés ». Si elle doutait encore de son identité, il venait de lui donner un sérieux indice. Décollant sa hanche du meuble elle s’avançant vers lui jusqu’à ce qu’il n’y ait guère plus de quelques centimètres les séparant et elle vint délicatement prendre son menton entre ses doigts, l’amenant baisser légèrement le visage vers elle.

- Vous ne doutez de rien, Seigneur des mouches, mais vous êtes arrivé trop tard. Je doute que les démons sachent tous s’y prendre comme Rémiël et Saraquiel savent y faire avec les femmes. Elle l’observa un instant en silence avant de relâcher son menton et de tapoter doucement son torse. Jouer, avec vous ? Tout dépend de ce que vous entendez par « jouer ». Par exemple, je voulais jouer avec Pete mais vous m’en avez coupé toute volonté et par votre interruption, vous avez dissipé quelque peu les effets de l’alcool.

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Jouer à ce jeu auquel Shiobán s’adonnait n’était aucunement un moment où la sureté était garantie. Non seulement elle ne se trouvait pas dans les meilleures dispositions pour répliquer si le pire devait arriver mais sa condition d’humaine faisait qu’elle se trouverait impuissante devant le danger que constituait cette divinité, bien déterminée à ne pas la laisser découvrir son nom si aisément. Si les anges étaient les êtres protecteurs vers lesquels les humains se tournaient dans leurs prières, ils n’en restaient pas moins à l’image de ceux qui les révéraient : faillibles dans leur devoir. Tous ne répondaient favorablement aux prières, parfois trop tard tant la vie sur Terre se montrait si changeante et courte. Certains pouvaient se montrer si droits et inflexibles qu’ils ne pouvaient être considérés bien différents de leurs frères déchus, attisant la crainte dans les cœurs et les esprits. Et certains anges faisaient fit des lois édictées par leur Père, frayant avec une humanité dont ils devaient se tenir à l’écart en restant principalement des spectateurs. Comme Saraquiel, dont l’amour des humaines finirait -du moins l’espérait-elle- par courir à sa perte et celle des siens. Shiobán prit une légère inspiration, elle se portait mieux lorsqu’il n’était pas là.

- Tant de mystère.

Il n’avait ni validé ni infirmé sa supposition concernant le pardon de Rémiel mais dans l’immédiat cela n’avait pas la moindre importance. L’être divin avait plus que probablement deviné la bonne identité de l’ange s’étant lié à elle sans pour autant être pleinement certain qu’il ne s’agissait pas du second. Elle senti le coin de ses lèvres tressaillir. Cet être n’était pas un ange, il s’agissait d’un démon et elle ne pouvait se permettre de se jouer de lui comme elle aurait pu le faire avec une autre de ces créations qui enfermait l’humanité dans des cages. Elle devait rester méfiante et n’écarter aucune possibilité quant à ce qu’il adviendrait une fois que leur chemin se séparerait. Elle se rapprochait de lui, laissant un rire s’échapper de sa bouche alors qu’il lui avouait à demi-mots de quel côté du panthéon monothéiste il se trouvait, elle alla jusqu’à laisser ses doigts entrer en contact avec la peau du brun. Une innocente humaine qui ne se trouvait pas être une idiote. Une humaine qui pouvait aisément voir sa nuque être brisée au moindre mot de travers. Observant l’être divin, Shiobán ne laissa pas disparaître le fin sourire que ses lèvres affichaient.

- En effet mais, me suis-je trompée ? réagit-elle sans que toutefois cela ne soit prononcé comme une question. Si elle s’était trompée, il n’aurait pas pris la peine de la mettre en garde, qu’elle eut été le jouet d’un archange ou non. Laissant le contact entre leur peau se briser, elle laissa la main de l’être de divin venir jouet avec une de ses boucles tandis qu’il réagissait à ses mots. Pas son genre de femmes… De quoi décevoir autant que blesser l’orgueil, mais au moins elle pouvait avoir une certaine garantie qu’il ne se présente pas à elle régulièrement pour l’importuner. Voilà une excellente idée, je ne voudrais pas commencer à me déshydrater, répondit-elle tandis qu’à l’extérieur quelqu’un frappait à la porte. Un de ses collègues s’inquiétant de ne pas la voir ? Pete revenant à la charge ? Ou bien un inconnu devant urgemment soulager une envie pressante. S’écartant du démon, Shiobán alla jusqu’à la porte et l’ouvrit sur un homme d’âge mûr qui se précipita dans les premières toilettes disponibles. Prêt ?

Comment pouvait-on réellement être prête à consommer de l’alcool en compagnie d’un démon ? Quoi qu’il en soit, elle avait été entraînée et formée par l’Organisation il ne tenait qu’à elle d’obtenir des éléments d’informations dont les siens pourraient se servir. Elle lui lança un grand sourire avant de prendre la direction du bar en sa compagnie.

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